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©Le Canard enchaîné – 22 décembre 2010.
Les journalistes de C dans l’air, l’émission d’Yves Calvi sur France 5, m’ont demandé de montrer un extrait du documentaire Les médicamenteurs et de le commenter.
Il s’agit d’une vidéo des assises santé de l’UMP, en juin 2006. Nicolas Sarkozy y salue son ami « Jean-François » – c’est-à-dire Jean-François Dehecq, PDG de l’époque du géant pharmaceutique français Sanofi-Aventis. Dans les murs de l’Assemblée nationale, Monsieur le PDG s’adresse vertement aux députés UMP. Il leur dit notamment :
« Mon objectif, avec mes godasses tricolores et mes bretelles tricolores, ça a été depuis le début de bâtir pour la France une industrie pharmaceutique qui soit digne de ce nom. Bon, trente-cinq ans ans après, vous les députés, vous adorez venir inaugurer mes centres de recherche et mes usines. J’aimerais que vous vous en souveniez un peu quand vous être assis à l’Assemblée nationale et quand vous votez les lois. »
Pour revoir C dans l’air du 6 janvier 2011 et ce morceau d’anthologie (qui est passé au zapping !), cliquer ici.
Les 22 décembre 2010 et 4 janvier 2011, Michel Field m’a invitée sur le plateau de son émission de LCI pour parler de l’affaire du Mediator. La première fois, j’étais avec Claude Le Pen, économiste de la santé. La seconde, avec Fabienne Bartoli, directrice adjointe de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS).
Dimanche 12 décembre, j’étais invitée à 3D, l’émission de Stéphane Paoli, sur France Inter, pour parler du Mediator et des questions qui en découlent. C’était en compagnie de :
–Gérard Bapt, cardiologue, député PS de la 2ème circonscription de Haute-Garonne, rapporteur spécial de la mission santé pour la Commission des finances de l’Assemblée Nationale.
–Sophie Chauveau, historienne, enseignante à l’université Lyon II, auteur notamment de « L’invention pharmaceutique : la pharmacie française entre l’Etat et la société au XXe siècle » (Les empêcheurs de penser en rond, 2000).
-Bruno Toussaint, directeur de la rédaction de la revue Prescrire, la seule revue médicale indépendante en France.
Pour (ré)écouter l’émission, cliquer ici.
Le lundi 6 décembre, Xavier Bertrand, ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé a craqué. Patrick Cohen l’interroge sur le Mediator au micro du 7/9 de France Inter. Il lui demande si les pouvoirs publics ont fait preuve de complaisance. C’est là que Xavier Bertrand s’agace et part en vrille : « Mais vous vous rendez compte de ce que vous venez de dire ? ». Et chouette, grâce à la magie internet, on peut même VOIR l’agitation de Xavier Bertrand vers la 9e minute sur dailymotion. Repétage de plombs dans la 2e vidéo à 3’30. Patrick Cohen alors l’interroge sur le document préparatoire à une réunion de la commission de la Transparence de la Haute autorité de santé, révélé par le Canard de la semaine. Un document édifiant, daté de 2006, où il est écrit noir sur blanc que le Mediator est un anoréxigène qui a été associé à des « troubles cardiaques graves ».
Pas très à l’aise, visiblement, le bonhomme. C’est lui, cependant, qui a choisi d’aller au front sur le Mediator. Comme le racontait le Canard enchaîné du 8 décembre, la secrétaire d’État à la Santé, Nora Berra, est privée de parole en public surle sujet. A peine nommée, elle s’était fait remarquer en prenant la défense du laboratoire Servier, le labo fabricant. Un faux départ qui avait le mérite de la clarté, car Nora Berra a travaillé pour l’industrie pharmaceutique (Sanofi-Aventis notamment), de 1999 à 2009. Elle n’y voit aucun conflit d’intérêts. Désormais, les journalistes qui appellent le service de presse du ministère de la Santé à propos du Mediator sont systématiquement renvoyés vers le cabinet de Xavier Bertrand.
Xavier Bertrand
envoyé par franceinter. – L’info internationale vidéo.
Xavier Bertrand
envoyé par franceinter. – L’info video en direct.
Il y a eu le Vioxx, le Cholstat, maintenant, c’est le tour du Mediator. 500 morts au minimum selon l’étude de la Caisse nationale d’assurance maladie rendue publique en novembre 2010. Sans même parler des patients qui souffriront à vie d’effets secondaires très lourds. Rien de très étonnant, malheureusement, quand on s’est penché sur l’organisation de notre système de santé. Les Médicamenteurs décrivent tout le processus de mise sur le marché des médicaments, ainsi que leur suivi en « vie réelle » dans le corps de patients. Et toutes les bases de ce désastre y sont décrites par le menu. Nos instances ont été incapables de détecter les médicaments dangereux. C’est l’incroyable détermination d’une femme, Irène Frachon, médecin pneumologue au CHU de Brest qui a permit de faire éclater au grand jour cette affaire.
On peut lire l’excellent éditorial du Formindep, qui replace l’ « affaire Mediator » dans le contexte plus global de notre système de santé.